• Je rentrai dans la maison. L’affreuse fille aînée était devant les fourneaux ni  touiller dans son chaudron ; du four sortait une bonne odeur de ragoût et d’herbes inconnues, qui poussaient probablement dans les environs et qui n’étaient connues que des femmes du village. Etrangement, ça me rappelait mon enfance. J’en avais l’eau ni  la bouche. Alors comme ça, la vieille bufflonne voulait se marier ! « Je me demande si ses sœurs font leur polenta. » Je ne les voyais nulle part. Soudain, je fus pris de sueurs froides. Et si je tombais sur la polenta de celle-ci ? Etait-ce possible d’avoir une guigne pareille ? Tout ni  coup, je pensai ni  une chose. Puisqulil y avait des filles qui refusaient des prétendants, il devait bien y avoir des prétendants qui refusaient des filles ! Et s’il y en avait, que leur arrivait-il ? Les filles récalcitrantes étaient changées en bufflonnes. Est-ce que les gars tatillons devenaient des… buffles ?

    Je me rendis au village vers midi. Les polentas étaient alignées sur une longue table couverte de napperons brodés et les garçons tournaient autour. Ils trituraient leurs chapeaux entre les doigts, regardaient, goûtaient. Chaque polenta avait un signe quelque part en dessous et ce signe était inscrit dans un livre tenu par le prévôt, par conséquent il n’y avait aucun risque d’entourloupe. En plus de la polenta, les filles avaient préparé des plats qui allaient être mangés avec : du chou farci, du chou sauté, des ragoûts de lapin et de perdrix ; et bien entendu, des gobelets de gnôle.

    Jlavais une faim de loup, car les prétendants ne recevaient rien ni  manger ce jour-lí . Je regardai toutes les polentas mais aucune ne se distinguait beaucoup des autres. J’en trouvai quelques-unes unes qui étaient froides et dures, comme l'enfant me l’avait dit, et je compris que ce n’était pas une blague.

    Tout ni  coup, je vis un gars prendre une polenta. Aussitôt, la propriétaire se montra et je crus mourir de dépit, car c’était une fille de toute beauté. Un autre gars prit une autre polenta et on lui emmena ni plus ni moins que la jolie sœur de l’affreuse, celle qui m’avait tapé dans l’œil. Mis en rage par la veine des deux autres, j’attrapai moi aussi une polenta et lí , je vis aussitôt arriver mon hôte qui tenait par la main sa vielle guenon. Il me dit : ni  la bonne heure, mon garçon ! Pendant ce temps, la mocheté me souriait de toutes ses longues dents plantées de travers et arrangeait – avec de ces manières, tudieu ! – sa maigre chevelure lavasse.

     

     
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